Caroline Lejeune

"on the road again"
peinture

du 1er au 26 octobre 2002


Caroline Lejeune

Née en 1971 à Vire
86 rue Pixérécourt
75020 PARIS
01.46.36.64.31 & 06.07.09.48.90

Formation
1998Diplômée de l‘École Nationale Supérieure des Beaux-Arts
Expositions personnelles
2002Galerie du Haut Pavé, quai Montebello 75005 Paris.
1998Paysages Imaginaires d‘après Photographies à l‘espace Dark and Wild, 75018 Paris.
Expositions collectives
2002Le Paysage, Saint Quentin
Fondation Coffim, exposition des lauréats 2002
2000Jeune Création, Conseil Général de Haute-Vienne.
Symposium International de Recherche en Art Contemporain, Espace Michel Simon, Noisy-le-Grand, Prix Espoir.
1999IN-EX à La Riche.
Galerie Yoshii, avenue Matignon.
1998Exposition collective, espace Dark and Wild, 75018 Paris.
1997Exposition collective - Géricault et points de vue contemporains, ENSBA.
Prix - Bourses - Résidences
2002Fondation Coffim — Prix spécial du jury
2001Sélection pour le prix Château Haut Gléon, résidence d‘artiste 10 jours et exposition, Lejeune- Liot- Reyna.
Premier prix Jean-François Millet, 6e Salon Internationnal d‘Arts Plastiques de Valogne.
2000Résidence d‘artiste à la fondation Dufraine à Chars (6 mois).
1999Lauréate de la résidence d‘artiste de la fondation Joshii Kihoharu Art Colony pendant 3 mois au Japon.
1998Lauréate de la bourse de la vocation de la fondation Bleustein Blanchet.
Lauréate de la fondation 3 Suisses.
1996Bourse de la Ville de Paris, Direction des Affaires Culturelles.
Bourse Erasmus de trois mois pour étudier le cinéma à Sheffield Hallam University au Royaume-Uni.
1995Bourse Collin Lefranc de quatre mois pour étudier au Hunter College à New York.
Troisième Prix Talens.
Premier Prix Perrier Jouet.


Caroline Lejeune
La forêt mange-regard
 
Les arbres sont autant de mâchoires qui rongent
les éléments, épars dans l‘air souple et vivant :
tout leur est bon, la nuit, la mort ... et la terre joyeuse.
Regarde la forêt formidable manger.

V. Hugo. La légende des siècles
 
D‘abord et avant tout, la forêt, surtout si elle est tropicale ou équatoriale, mais même si elle est une bonne vieille forêt sauvage de nos contrés tempérées, est par excellence le lieu où se perd le regard. Pour les vastes paysages de montagnes ou de désert, on dit que l‘on voit jusqu‘à «perte de vue». Cela veut dire que l‘on voit jusqu‘où la vue ne peut plus aller, à l‘extrême loin. Avec la forêt, c‘est exactement l‘inverse ; elle est le lieu où le regard ne peut même pas commencer, où il est brouillé, dès l‘extrême proche, perturbé, envahi, hors d‘état de rien distinguer, dans ce foisonnement, ce chaos formel, ce charivari visuel.
C‘est dire que le thème de la forêt est sans doute l‘un de ceux qui ont le plus intimidé les peintres, que bien peu d‘entre eux ont été capables d‘y aventurer leur vision, de transformer leur pinceau en machette ou en tronçonneuse. Il y a eu surtout les Allemands, Altdorfer, Dürer, Friedrich, Max Ernst, et puis d‘autres comme Courbet ou Wilfredo Lam. Tous avaient plus ou moins insisté sur ses «murmures» et ses «enchantements», comme chez Wagner.
Caroline Lejeune prend le problème à bras le corps et de toute autre manière.
La forêt, elle la dompte. L‘asservit. La soumet à ses règles. Et même s‘en sert très subtilement pour pervertir notre regard, c‘est-à-dire, finalement, l‘agrandir. Elle le fait de deux manières.
Premièrement le passage au «noir et blanc». Les innombrables nuances du vert et du brun, qui sont quand même l‘essence chromatique de la forêt, sont totalement éliminées. L‘oeil n‘est plus dans ”l‘enfer vert•, mais dans d‘inextricables limbes grises, où il n‘y a plus qu‘à errer comme un fantôme, une âme en peine, en peine de se repérer, de voir ici autre chose que de la peinture.
Ici, ce n‘est plus la chlorophylle qui transforme la lumière en énergie, mais c‘est l‘intelligence de l‘oeil. Forêt noire, celle-ci, celle où l‘on ne chemine que sur les «chemins qui ne mènent nulle part» chers à la philosophie de Heidegger.
Le deuxième piège est plus pervers encore. C‘est celui du miroir, de la symétrie, et même de la quasi-symétrie, pas très exacte, un peu faussée. Ainsi, non seulement on est perdu dans les fouillis, les taillis, les feuillages, les ombrages, mais on est sur-perdu comme dans ces labyrinthes de miroirs que l‘on voit dans les fêtes foraines. Là, le regard est à la fois Thésée et le Minotaure. Et seule Caroline Lejeune est Ariane capable de pouvoir nous en sortir, à condition d‘accepter son fil, c‘est-à-dire, la patience de circuler longuement en ces sylves dédaliennes. Ne compter pas sur la boussole, elle est confisquée par la nervosité des champs magnétiques formels. N‘espérez même pas en l‘horizon, il n‘y en a pas. On est purement et simplement dans l‘espace. Il ne m‘étonnerait pas que le prochain projet secret de Caroline Lejeune soit de peindre en apesanteur. Pour qu‘il n‘y ait même plus ni haut ni bas.

Gérard Barrière, 18 septembre 2002

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