Franck Mouteault

Master Soustraction

du 28 septembre au 30 octobre 1999


Franck Mouteault


né en 1967
17 rue Paul Bert
75011 PARIS
01.43.48.71.14

Formation
1988-91École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris - Diplômé de peinture avec les félicitations du jury
1984-88École Nationale Supérieure des Arts Appliqués Duperré - Diplômé en création textile avec les félicitations du jury
Expositions
1999Prix Marin, Arcueil (obtention du 2e prix)
Salon de la Jeune Peinture, Paris (obtention du prix)
1998Les Ateliers de la Poudrière, Seyssel
1997Baignade Interdite, Les Ateliers de la Poudrière, Seyssel
1994-96Salon de la Jeune Peinture, Paris
1994Exposition itinérante, Société de Banque Suisse
1992Exposition des Diplômés avec les félicitations du jury de l‘École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris
1991Exposition de groupe itinérante Citroën
1988/89/91Exposition de l‘Atelier Matthey à l‘École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris


Master Soustraction, 1999
PVC découpé, 40 x 110 cm


Joints 4, 1999
Formats avoisinant 65x50cm


Franck MOUTEAULT
Au-delà des formes géométriques...
Le plein, le vide, des signes, une écriture, du carton, du polypropylène, des découpages, une sorte de dessin industriel, des plans irréels, encore du plein et de plus en plus de vide... L‘univers de Franck Mouteault se décline dans une rigoureuse symétrie. De grands découpages, rouges, bleus, gris, blancs ou encore verts ont été exécutés avec une extrême précision à partir d‘un dessin méticuleux. Règles draconiennes et récurrentes ? Bien sûr, mais également extrême liberté de celui dont le geste n‘admet pas de retour mais qui se laisse aller à une géométrie personnelle, à une symétrie désinvolte recherchée, à une mécanique intemporelle, inclassable. Le hasard n‘est pas ici laissé pour compte mais participe à cette lente et scrupuleuse élaboration. Espaces intérieurs où l‘imaginaire installe ses rythmes et construit son propre monde structuré, mathématique mais qui ne manque pas d‘humour. Suivre le calcul soit, mais toujours retrouver un ordre, l‘essence même des choses. L‘artiste découpe la réalité en plein-vide, en absent-présent pour créer ses «master-soustraction» qui s‘étalent sur les murs blancs, impassibles. Structures impeccables de ronds et d‘angles parfaits, qui créent un réseau immuable de circuits intégrés, croirait-on.
Le spectateur ne pourra que s‘interroger devant ces formes peu ordinaires. Des joints de culasses se demandera-t-il ? Qu‘à cela ne tienne, oui pourquoi pas. Mais au-delà, c‘est tout un langage, tout un vocabulaire qui se profilent. Franck Mouteault est passé des découpages au carton, litanie de sigles qui n‘étaient pas sans rappeler l‘écriture précolombienne, à un vaste rhizome pictural dans lequel se perdent les références d‘un mécanisme insoupçonné, que chacun peut interpréter, décortiquer à sa façon. Ces agencements de pièces sont d‘ailleurs disposés pour produire un mouvement, un effet donné : non pas celui de l‘oeuvre exposée mais bien plutôt la réaction de spectateur qui avance, recule devant ces découpages colorés. Le moteur de l‘oeuvre de Franck Mouteault n‘était-il pas avant tout l‘avide curiosité pour l‘événement visuel que conduisent ses gestes précis mais libres et le regard des visiteurs qui cherchent ?
Sa cartographie particulière permet de passer d‘une lecture abstraite voire minimaliste des formes géométriques à des images concrètes voire humoristiques, comme dans son installation de petits «master-soustraction» détourés au feutre, réunis sous l‘intitulé «Quand on prend quelque chose, on le remet à sa place». Chaque élément découle d‘un autre, c‘est ce que semble démontrer cet ensemble. Nous ne sommes finalement pas loin de la réalité. Mise en lumière du travail de Franck Mouteault, dispositif parfait s‘il en est, mais qui ne manque pas de répartie, comme ses coulages en béton fibré, ses «slices» posées au sol ou ses cartons découpés, suspendus qui ont servi de patrons aux principales pièces. Une exposition qui laisse à voir finalement toute l‘évolution et le cheminement de l‘oeuvre de l‘artiste.

Muriel Carbonnet


Je me souviens d‘une fin de journée douce et facile. J‘avais d‘abord pris quelques verres dans un bar de la Butte-aux-Cailles, derrière le comptoir duquel officiait une jeune fille à qui je ne savais pas dire que je la trouvais belle parce qu‘absente et périphérique. Puis je m‘étais rendu à ce rendez-vous fixé à l‘atelier de Franck Mouteault.
«Quand on prend quelque chose, on le remet à sa place» m‘avait-il immédiatement affirmé. Je me retrouvais devant deux pans de mur en soupente sur lesquels étaient accrochées, comme à la parade, des formes découpées dans des plastiques de différentes couleurs. La symétrie presque industrielle, l‘exécution méticuleuse quasi obsessionnelle de ces créations me firent d‘abord reculer. Je ne voyais qu‘un questionnement dans la répétition, une rétention dans la mesure.
Pas à ma portée.
Je repensai à la jeune fille périphérique. Pourquoi d‘ailleurs ? Était-ce parce que tout ce qui m‘était donné à voir dans cet atelier relevait de l‘absence et du manque ? Peut-être qu‘en effet il en allait de ces travaux ayant la discrétion de la technique comme cette jeune fille derrière son bar ; l‘important n‘était pas ce qu‘ils faisaient ou ne faisaient pas mais ce qui se produisait sans leur consentement, la création ou la séduction ; l‘important était l‘indice, le langage qui se dégageait de leur simple présence.
Je lui dirai que l‘expérience, je devrais plutôt écrire «le jeu», que Franck Mouteault initie sur l‘établi dans le silence de la couleur me fait penser à ces paysages élémentaires dont l‘humilité, par-delà les contraintes et les absurdités, contient la réponse même à la question.
Encore un mot, le dernier : l‘extrême modestie avec laquelle ce jeune homme interroge la matière, vagabonde autour du vide en réussissant la gageure de ne pas s‘y impliquer, l‘humour qu‘il met dans son art, c‘est tout cela qui en fait un chercheur d‘essentiel.
Le reste est accessoire.

Laurent Cirelli

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