Vogel APACHETA

« La Hija del Sol »

Exposition du 28 mai au 29 juin 2024

L’exposition La hija del Sol fait allusion au pouvoir symbolique de l’énergie solaire, ainsi que la création de l’être humain. Avec cette exposition je souhaite aborder la vie et l’énergie solaire qui nous maintient en vie sur terre. Nous sommes tous enfants du Soleil, nous sommes tous des enfants de la Terre mère Pachamama. Cette année nous célébrons le retour du Soleil 5532 le nouvel an Aymara dans l’équinoxe d’hiver de l’hémisphère sud. Je souhaite célébrer ce retour du Soleil reconnaissante pour la vie, et, la joie et toute la lumière qu’il m’apporte. Avec cette exposition j’aimerais partager une métaphore qui entoure mon travail dans l’exposition.
Maître des maîtres ;
Tous les enfants du soleil sont appelés à partager tout leur apprentissage aux générations futures vers le chemin de la lumière. Répand toute ta lumière. C’est toi qui t’es choisi. C’est toi qui apportes l’énergie solaire.

« Ce qui se dilue, se dissout, chez Vogel Apacheta, c’est la forme. On devine ses sources picturales dans la végétation et les paysages de son pays natal ou d’ailleurs. Elles resurgissent sous forme de fragments qui auraient été déstructurés, déconstruits, par un dispositif semblable à celui d’un kaléidoscope, avec des effets de réflexions en miroir, des lignes de clivages, des pliages, des fausses symétries, des collages et des superpositions… Nous sommes ici dans un espace de pleine liberté, dans lequel la question de la figuration ou de la non-figuration ne se pose pas. Les peintures qui en résultent entrent ainsi en résonance avec un autre propos de Malraux qui écrivait : « Le conflit entre figuratifs et non-figuratifs n’a d’importance que par son enjeu, qui fut la liberté du peintre (Pollock commence à Olympia…), fût-elle la liberté de trouver de nouvelles figurations. On ne l’abandonnera pas de sitôt. »

Les formes, outre des réminiscences végétales, peuvent traduire graphiquement des itinéraires réels ou fantasmés, des éléments architecturaux, des objets de l’environnement quotidien, des petits riens sans importance empruntés à la vie de tous les jours, abordés de façon factuelle ou avec un brin de révolte ou de folie. La couleur, toujours très présente, explose et projette ces lignes et surfaces dans un espace mis en abyme, comme Yves Bonnefoy le déclare : « La couleur n’est-elle pas là pour jeter d’un coup toute sa profondeur dans le discours du tableau ? » Souvenirs de son enfance andine ou notes relevées dans l’espace urbain de l’Europe occidentale, mélange des deux ou effets de synesthésies, comme nous le verrons, tout est bon pour faire ressentir le chaud et le froid, la sous-jacence d’un geste incisif qui réveille, interpelle ou fait rêver le spectateur sans, pour autant, imposer une lecture ou une interprétation univoque. Interrogation d’un inconnu, celui de l’artiste et celui du regardeur… L’artiste, dans son enfance au pied des cimes, ne se posait-elle pas la question : qu’y a-t-il derrière la montagne ? Au regardeur de ses peintures de répondre… »

Extrait du texte de Louis Doucet, critique d’art, 2024

Vogel Apacheta, née en 1984 à La Paz (Bolivie), vit et travaille à Paris. Elle a effectué ses premières études d’art à l’Académie des Beaux-Arts Hernando Siles à La Paz, où elle s’est spécialisée dans le dessin, la peinture, et la gravure. En 2012 elle a été diplômée à l’École Supérieure des Beaux Arts TALM Le Mans où elle obtient le diplôme DNSEP ( diplôme national supérieur d’expression plastique) grade Master. Son travail a été présenté à la Biennale d’art SIART Bolivia dans jeune création en 2009, ainsi que en 2011. Son travail a été également exposé à La Tabacalera de Madrid 2018, et à Berlin, lors de sa première exposition personnelle à Galerie Tête (artist run space) 2020. En 2019 elle est invitée à participer à une exposition consacrée à la nouvelle génération de la peinture contemporaine bolivienne à la Fondation Simon I. Patiño à Santa Cruz de la Sierra en Bolivie, curatée par Maria Schneider.

Aline DECROUEZ

« Surfaces profondes »

Exposition du 5 au 22 décembre 2023

Vernissage mardi 5 décembre de 18h à 21h

Toute surface a sa profondeur. Toute surface est profonde. De la superposition de couches successives, plus ou moins opaques, émerge une surface. Cette accumulation de strates colorées recouvrant un support devient épaisseur, intensité, surface profonde.

Ici, l’empilement ou la juxtaposition de monochromes dont certaines coulures mettent en évidence l’épaisseur du support tout comme la superposition de formes colorées assemblées évoquent la matérialité de toute surface, son histoire propre ; la profondeur comme possible matérialisation de la pensée pour faire sens à la surface.

Résultant d’un geste artisanalement mécanique répété, ces surfaces ne se veulent pas nécessairement lisses et parfaites. Selon l’outil utilisé, celles-ci peuvent donc variées.

Exposition Intimes Lisirères – Abbaye de Trizay

Ma pratique relevant d’une volonté de construction et d’organisation à partir du lieu d’exposition, le recours régulier au rouleau à peinture fait écho à la peinture en bâtiment que l’approche architectonique de certaines de mes pièces peuvent rendre compte. Il n’est pourtant pas seulement question de construction mais aussi d’approfondissement dans la recherche et l’expérience. Appréhendant la matière dans un rapport physique et sensible, la juxtaposition et le choix des couleurs découlent de bases intuitives et non d’un échantillonage extrait de la charte des couleurs ou de l’application de théorie coloriste. Formes et couleurs rythment les combinaisons. Une histoire de peinture en somme mais pas que.

Par le relief, la peinture devient volume, sculptures plates, surfaces profondes qui ne revendiquent que la couleur.

Par le va-et-vient proximité/éloignement, en adoptant différents points de vue, se construit une intime relation produite par des tensions sensibles. Un imaginaire s’opère alors à l’endroit où ces tensions se constituent; des tensions qui maintiennent un équilibre – tension interne et mise en tension des surfaces monochromes – et forment un ensemble qui engendre échos, contrastes, percées, jouant sur le plein et le vide, l’apparition-disparition.

L’interaction couleur-espace étant l’essence même de mes préoccupations, le lieu dans lequel mon travail s’inscrit lui donne toute sa dimension évocatrice. Le support des touches colorées dépasse les limites du tableau pour investir l’espace. Chaque mise en espace me permet de jouer sur différents points de vue selon de nouveaux dispositifs chromatiques et formels.

Ainsi, qu’ils soient assemblés pour former ce que je nomme des peintures volumétriques, des « peintures en volume », ou agencés séparément dans l’espace, les monochromes que je réalise tentent d’interroger les relations que l’homme entretient avec son environnement – au sens de ce qui entoure -, mettant en abyme la perception.

Aline Decrouez, 2023

Sarah KRESPIN

« Mutation »

Exposition du 26 septembre au 21 octobre 2023

Vernissage mardi 26 septembre de 18h à 21h

Sarah Krespin, dans ses sculptures tissées, ses Mutations, apparemment molles, fait écho aux incertitudes et aux craintes de notre époque. Ni figées ni libres, mais comme prises dans des spasmes convulsifs, elles procèdent des trois règnes : minéral, végétal et animal. De sa formation à l’École Duperré, elle a gardé un tropisme pour le tissu, souple mais rigidifié par le recours à une armature en fil de cuivre qui en fige la forme et en fait le monument mémoriel d’un geste unique, non reproductible, qui, même si elle voulait le répéter, ne produirait pas des résultats semblables. […]

Le hasard tient une grande place dans le travail de Sarah Krespin. Au-delà d’une impulsion initiale, ses oeuvres semblent laissées à leur propre évolution organique, que l’on imagine non maîtrisée, imprévisible, à laquelle le spectateur aimerait contribuer en brisant le tabou du noli me tangere muséal. Le titre même de ces pièces, Mutation, porte en lui cette notion de lente évolution génésique, d’une oeuvre à l’autre, mais aussi de chacune d’elle dans ses monstrations successives. Certains y verront des fossiles de temps immémoriaux, d’autres d’improbables chrysalides d’où émergeront des êtres insoupçonnés, certains encore, plus prosaïquement, des serpillères étreintes pour en évacuer l’eau, d’autres, enfin, les reliques d’une activité humaine rendue indéchiffrable par les affronts du temps. Le spectateur reste définitivement indécis devant ces objets hybrides qu’il peine à identifier et auxquels il n’arrive pas à attribuer une fonction ni une raison d’être.

Organiques et évolutives, les structures, apparemment figées, mais potentiellement vivantes, de Sarah Krespin évoquent le caractère cyclique de certaines transformations du règne animal, notamment le processus de desquamation chez des reptiles. On peut les lire comme des mues de serpents de grandes dimensions, lesquelles suscitent simultanément attraction et répulsion. On pense aux vers de Boileau :

« Il n’est point de Serpent, ni de Monstre odieux

Qui par l’art imité ne puisse plaire aux yeux.

D’un pinceau délicat l’artifice agréable

Du plus affreux objet fait un objet aimable. »

Reliques d’un serpent humanisé, qui renvoient à l’Homme, comme le souligne Giraudoux, mais aussi traces d’un geste unique, celui de l’artiste, dont l’incomplétude définitive, dûment assumée, appelle une suite, une continuation laissée à l’initiative du regardeur…

Si l’on veut oser une analogie scientifique, les travaux de Sarah Krespin ressortissent à une physique des états intermédiaires. État mésomorphe, matière molle… sont, en effet, des termes qui pourraient s’appliquer à ses sculptures tissées. Il en résulte, chez le spectateur, un sentiment d’incertitude, d’instabilité, d’indéfinition, de non-fini, d’un entre-deux difficile à appréhender dans son intégralité. Les formes proposées au regard semblent mouvantes, malléables, fugitives, incertaines, en perpétuelle redéfinition, à la recherche d’une stabilité, d’une assise qu’elles récusent cependant.

Louis Doucet

1 In L’Art poétique, 1674.

www.sarahkrespin.com

Yoann XIMENES

« Sound System(s) »

Exposition du 6 juin au 2 juillet 2023

Vernissage mardi 6 juin 2023 de 18h à 21h

Né à Perpignan et vivant actuellement à Rivesaltes (Pyrénées-Orientales), Yoann Ximenes a un parcours atypique mais construit. Diplômé en langues étrangères, puis en ingénierie culturelle et finalement en « Art Contemporain et Nouveaux Médias » à l’Université Paris 8, l’artiste articule son travail autour de la communication et de sa mise en forme. Chargé de cours à l’Université Paris 8 pendant 5 ans il a été l’un des assistants de production au sein de l’atelier de l’artiste Carlos Cruz-Diez. Entre autres il remporte en 2015 le Prix Yicca à Rome, représente la France lors de la Biennale Mediterranea #18 à Tirana (Albanie) en 2017 et reçoit en 2020 le 1er prix de la Fondation Charles Oulmont.

L’artiste mène une recherche poétique fondée sur l’observation du phénomène sonore. Il met en scène ce que l’on ne peut voir ; que ce soit les discours politiques ayant forgé le monde moderne, la guerre des mots dans le conflit israélo-palestinien, le 1er cri du 1er bébé éprouvette, la naissance de l’Univers en Égypte Antique, le chant de planètes ou la perte de biodiversité. Ses œuvres confondent les stimuli sensoriels, imbriquent  le sonore et le visuel qui se répondent, tel un écho de la forme. Les recherches de l’artiste explorent les énergies sonores dans le processus créatif afin de questionner notre appréhension du monde.

Sound System[s]

En quelle mesure l’univers sonore façonne le monde physique et influence notre appréhension de la réalité ?

Il est un fait indéniable aujourd’hui : nous vivons sur une planète vibrante, dans un univers en vibrations. La Science ne cesse fournir des preuves, de ce que Hans Jenny[1] explicitait dans les années 60 : « À chaque fois que nous observons la Nature, animée ou inanimée, de nombreux éléments attestent des systèmes périodiques »[2]. Depuis la plus petite échelle jusqu’à la plus grande, les choses de l’univers existent par périodicités, pulsations, oscillations et vibrations. Ça sonne dans tous les coins. Le son est une énergie invisible et immatérielle qui n’existe que s’il y a un corps pour le diffuser. Il est la conséquence d’un mouvement de matière qui le révèle et l’incarne ; sans elle aucune périodicité, pulsation, oscillation et vibration ; aucun son.

Dans cette exposition intitulée « Sound System[s] » l’artiste aborde l’importance de la communication et de sonorités dans notre compréhension du monde. Ici différents échos résonnent ; la parole des hommes politiques qui influence notre monde vulgairement dénommé le « système » ; le cris des oiseaux éradiqués au sein de leur écosystème ; et enfin la mélodie du système solaire.

Il nous présente une partie de son projet « Mantras » ; interprétation contemporaine de la Création, appréhendée comme un « work in progress », dans lequel il aborde notre civilisation actuelle, caractérisée par une cacophonie incessante (infos 24/24, moyens de communication à outrance, paroles creuses, paroles avant réflexions, …) qui se déleste du mot juste et précis. Pourtant, les mots métamorphosent le monde. Persuader les foules pour emporter l’adhésion, convaincre pour faire la décision, communiquer avec acuité pour transmettre, … : autant d’actions qui nécessitent un discours calibré au millimètre. S’ils sont justes, les mots deviennent des armes, des passions, …

Cette omniprésence de la communication humaine, intra-espèce, vient se mesurer à la communication inter-espèces, entre nous et le vivant animal. La série « Souvenir from Earth » entend montrer comment depuis l’enregistrement de biotopes on peut constituer un langage musical et le mettre en scène plastiquement afin de construire une œuvre politique engagée pour la conservation des écosystèmes. Rendre visuellement palpable des chants d’oiseaux disparus, permet d’éveiller une émotion plus forte qu’une simple liste de noms. « Souvenir from Earth » est une série de sculptures en charbon, insérée sous cloche à la manière des taxidermies, illustrant chacune un chant d’espèce aviaire fossilisé, à tout jamais perdu.

Enfin des photographies retravaillées à la dorure de son installation audiovisuelle « La symphonie des vagabonds », déambulation mystique que nous entretenons avec le cosmos, ouvre un dernier volet spirituel de cette exposition.


[1]Hans Jenny était un physicien et un naturaliste suisse qui a inventé le terme de Cymatique pour décrire les effets acoustiques des phénomène d’ondes sonores.

[2]« Whenever we look in Nature, animate or inanimate, we see widespread evidence of periodic systems. » in Hans Jenny, Cymatics : A Study of Wave Phenomena and Vibration, éd. Macromedia, 2007, p.15