OSCAR MALESSENE

OSCAR MALESSÈNE

 I WALK THE LINE

Exposition du 8 mars au 2 avril 2016

Vernissage le mardi 8 mars 2016 de 18h à 21h

Sans titre, acrylique sur médium, 20x25 cm (x4), 2015.
Sans titre, acrylique sur médium, 20×25 cm (x4), 2015.

Oscar Malessène / Sur le fil

Il ne faudrait pas résumer le travail d’Oscar Malessène à l’apparente rigueur de son abstraction géométrique. Car si sa peinture s’inscrit d’évidence dans la continuité de ce modernisme autoréflexif, qui n’a d’autre objet que le fait pictural lui-même, elle ne plie pour autant pas au fameux principe programmatique qui a également déterminé les premières heures de l’art concret. La permanence manifeste de ses compositions peut, a priori, induire en erreur. D’un tableau à l’autre se retrouvent en effet les mêmes arêtes de prismes bidimensionnels aux angles aigus, délimitant des aplats parfaitement lissés. Mais rien là qui ne relève de l’application d’un système prédéterminé, au contraire : chaque composition est, à l’œil, esquissée à la mine de plomb, sans qu’aucun modèle mathématique n’en établisse d’avance les rapports de proportions. Pas de préalable, c’est tout le paradoxe de cette pratique qui tourne tant et si bien autour de son objet qu’on la soupçonne d’en rechercher une construction parfaite – un idéal, figé, prêt pour duplicata. Alors qu’il s’agit à l’inverse d’un jeu de variations inlassablement retravaillées, montrant l’inépuisable champ de possibles offert par un simple motif. Une série de déclinaisons venant par là même, contre toute attente, souligner le caractère singulièrement fécond de ce registre de formes géométriques, souvent considéré aride.

La peinture d’Oscar Malessène ne vérifie rien. Un peu, donc, dans l’esprit de ce qu’avançait Hantaï : « Aboutir, arriver, conclure sont à mettre entre parenthèses, si possible. Préalablement maîtriser, c’est ne même pas commencer. C’est illustrer le déjà su. Pourquoi peindre alors ? »[1] Oscar Malessène s’y attèle pour justement se défaire de cette neutralité machinique à laquelle l’abstraction géométrique peut parfois conduire. Il peint, et l’énoncé est performatif : car après report de l’esquisse sur la toile le travail de la couleur est, pour lui, un vrai moment d’improvisation. L’acrylique est appliquée au rouleau en un seul jet. Aucune rectification ultérieure des teintes. Et ses gammes colorées ont de quoi surprendre – de fortes oppositions entre les primaires et les secondaires auxquelles se mêlent, c’est étonnant, des tons pastels relativement dissonants. Contrairement à ce que laisseraient présager ses compositions hard edge, Oscar Malessène utilise en fait nombre de demi-teintes. Il traite la couleur sans modelé, mais joue malgré tout d’une modulation : des jeux de camaïeux s’étagent ponctuellement sur les surfaces délimitées par les droites entrecroisées, leur dégradé marquant une continuité entre différentes facettes contiguës et venant ainsi cintrer l’espace.

Sans titre, acrylique sur toile polyester, 61x50 cm, 2015
Sans titre, acrylique sur toile polyester, 61×50 cm, 2015

La peinture d’Oscar Malessène est éminemment mobile. Elle n’est que variables, inflexions, formes concaves, convexes, venant replier puis déplier le plan du tableau. En physique mécanique on distingue deux états d’équilibre selon qu’un corps, écarté de sa position d’origine par un léger mouvement, y revient – on parle d’équilibre stable -, ou bien qu’il s’en éloigne pour retrouver un aplomb différent – on qualifie alors cet équilibre d’instable. Il faut, en définitive, envisager le travail d’Oscar Malessène dans l’idée de cet oxymore. C’est ce qu’annonce le titre judicieusement polysémique choisi pour cette exposition : marcher droit, cela requiert d’évidence quelque chose de l’ordre du déplacement. Un cheminement, un développement, menant parfois à un certain décalage – puisque to walk the line c’est aussi être à la limite. Sur le fil. Comme ces sommets qui, systématiquement, dans chacune de ces peintures viennent, à l’extrémité du champ pictural, accrocher le bord du châssis, indexant non sans une note d’humour le cadre, pour mieux dire une situation limite de la peinture.

Marion Delage de Luget

[1] Simon Hantaï, in Donation Simon Hantaï, Paris, Musée d’art moderne de la Ville de Paris, 1997, p. 35.

 Sans titre, acrylique et laque blanche sur papier, 40x30 cm, 2014
Sans titre, acrylique et laque blanche sur papier, 40×30 cm, 2014

www.malessene.blogspot.com